Jihad Intime : pas de match nul …

 

 

« Ta vie, Géant Jones : […] qu’un long et douloureux combat contre toi-même » (Higelin au sujet d’un boxeur)                                     

   

 

Jihad de prisunic, factice sur CNN comme sur TV Katar (Al-Jazira) : Le sens premier de la « guerre sainte » dans l’islam, qui est, sans en avoir l’air, très friand de symbolisme (son côté « la vie, mode d’emploi » masquant la lecture allusive possible d’un codex à tiroirs), c’est le combat contre l’Ego, la lutte en son for intérieur. Ça n’est pas rien … (C’est autrement plus difficile que de tirer des obus sur d’inoffensifs Bouddhas de pierre …)

 

Tant que le sentiment d’appartenance à un tout est en veilleuse (ou même majoritairement éteint) le bonheur reste un cap difficile.

Le bonheur de tous, cela va sans dire. De tous les volontaires, en tous cas…

Quand on dit « se ressourcer », « retrouver ses racines », il s’agit en fait de changer de l’état de conscience similaire à une girouette, le cou tendu, la tête ballottée par les vents, à celui d’un arbre agrippé aux autres plantes par les ramifications de ses racines et prêt pour la fusion à la terre par ses feuilles. L’être humain n’est qu’une excroissance sur le dos d’un dragon qu’on nomme l’humanité ; une écaille isolée n’a que peu de raisons d’exister. La non-compréhension de ceci est la première des ignorances à redouter quand on se croit assis sur le sommet du monde… Les discours glorifiant le patrie, une religion, un fractionnement d’humanité, cachent tous un obscurantisme égocentré. La passion de sortir et de garder la tête hors de l’eau peut être louée quand l’ignorance est écartée, si cette passion toute d’adrénaline (et/ou d’autres excipients… cf. « l’opium est la religion des riches » dans certains pays) n’implique pas une négation de l’eau, si aucune pollution de son environnement (donc des autres) n’est à la clef, par mépris, par irrespect de la règle fondamentale : l’espèce humaine est une et unique (génétiquement c’est l’évidence, contrairement au règne animal : pas de marsouins chez les dauphins, pas de gorilles chez les gibons)…

Quant à l’orgueil, il s’agit d’un infantilisme directement issu de l’ignorance déjà citée : la coquetterie d’un vers de terre qui se croirait à la fois le torpilleur et la torpille, tandis qu’il a le nez et le cul dans la terre, comme le reste, et que son corps lui-même n’est qu’un mini-pipe-line de terre…

 

Le fait que l’on puisse avoir, comme on dit grossièrement, « de la purée dans les yeux », le fait que la notion d’une réalité fusionnelle entre les individus soit le plus souvent rendue improbable, par l’assujettissement consenti, de tout un chacun, au subjectivisme d’une propagande démagogique (grosso-modo : « c’est mon choix, je peux forcément interpréter ce qui est devant moi, sans chercher ni à en douter consciencieusement, ni à l’agrandir, et pourquoi pas le magnifier »), le fait que l’on prenne pour argent comptant ce que notre attention, à 80% captée par les nerfs optiques et leur surface de conduction, nous inflige ; toutes ces conditions nous plongent dans un tourbillon de véracité chaotique, donc aléatoire. L’osmose est alors une respiration salutaire.

Soit il faut croire, sur un mode dit « démocratique », que chacun dispose de « sa » réalité, et que l’on a le droit de vivre dans une réalité personnelle défendable sans jamais être réductrice ; soit la réalité semble un champs d’investigation difficilement arpentable, montrant trop de balises à la fois, pour permettre de se rappeler que notre perception du monde est, par la force des choses, quasiment hallucinatoire (percevoir hors du temps n’est pas chose aisée, par exemple). Si l’on croit à une réalité morcelée, on risque fort d’avoir un rapport à autrui (c’est-à-dire avec ce qui est vivant ou minéral) schizophrénique, avec fatalement le contre-rendu incessant de nos sens en parallèle des arcanes propres à notre système de valeurs intérieures. Il  y aurait deux mondes : quelque part sous la peau, et celui d’autour …

« La vie est une illusion » dit le sage, et il a raison : la nostalgie en est une illustration (on transforme un vécu laborieux et hésitant en âge d’or reluisant), comme le culte du progrès, ou encore la cinéphilie, l’agoraphobie, le camping, le coiffeur, la mort, le sommeil etc. etc.

Même la philosophie, du jour où elle s’avise de mettre un point final à sa recherche, où elle se fait outil de cognition revendiqué, ne peut masquer que l’existence est une illusion pour quiconque n’a pas décédé au moins une fois dans sa vie…

 

Le désagrément avec l’Ego, c’est qu’il se croit menacé dès qu’on lui offre des vacances. Pour être vulnérable aux trois Gunas il suffit de se laisser conduire par l’Ego : l’orgueil, la passion et surtout l’ignorance, ne peuvent exister dans un univers tramé d’individualités interactives. Des murs sont nécessaires pour une prison digne de ce nom. Il est plus simple d’être innocent (de focaliser sans être aveugle, ou de « viser » du bon oeil) que de démolir les assemblages de parpaings dans lesquels on s’est laissé prendre en otage… C’est une image… Mais, allez, avouons le, l’Ego aussi est une image. Il ne détient pas la science infuse, il n’est pas titulaire d’un brevet de scaphandrier, immergé dans les eaux troubles du mensonge… Il reste un point de vue ponctuel, limité sur un panorama truffé de montagnes à plusieurs faces et de vallées souvent invisibles en contrebas.

« Un panorama unique ! » lit-on dans les guides de voyages. Il faudrait savoir : qui est unique ? Le panorama ou le touriste ? Coupons la poire en deux, disons qu’ils sont consubstantiels… L’un ne va pas ; sans l’autre… Mais, alors, pas du tout !

 

 


 

 

 

 

« Chaque jour j’attache moins de prix à mon intelligence » [Proust]                                    

 

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« résultats des courses » :

 

 

 

 

 

l'Ignorance

 

 

 On a le choix entre rester dans le noir, ou rester les yeux fermés. On ne nous a pas sonné …

Finalement : les yeux grands ouverts, mais uniquement de l'intérieur vers l'extérieur. In/out bloqué, sans ciller. C'est la lucidité à l'état brut, sans mémoire encombrante, ni perspective douteuse. Un choix aussi.

Et on en reste parfaitement interdit, de se voir (soudain) libres. Alors on s'écrase. On ne trouve pas les mots. Nul part. Nuls sans amarres.

Même là-haut, très au-dessus des étoiles, quelqu'un fait ses mots croisés sans penser à nous consulter …

Parce que c'est aussi l'hébétude à la longue. Le non-sens absolu : le quantifiable à outrance… Avec pour corollaire la négation de chacun. La foi dans le vide (avec superstitions bas-de-gamme en prime ; une vague crainte : les piles sont fournies ?)

On ne sait pas que l'on va être piétiné(s), tout en promenant nos gros sabots sur l'infiniment petit… Biffé(s) une fois pour toute. Out.

Tableau

 

 

 

la Passion

 

 C'est la foi, la foire, l'affolement avec son cortège de souffrances et de frustration. D'anxiété et de stress (le bon comme le mauvais stress). Le droit à l'improvisation aussi … La rencontre coûte que coûte. Une quête ; avec la joie, sans la gaieté (pour quoi faire ?). Des sursauts de lucidité, ou d'ennui, en dents de scie. - "Tumbler or strike !"

Ailleurs et tout de suite. Jamais est ici. C'est la porte ouverte … Une curiosité sans fond. Une distraction totale.

Pile ! Juste avant d'être oblitéré... Passion, suremployé ici dans le sens « saute d’humeur » (et non pas violon d’Ingres). Humeur prépondérante. Massacrante.

Soif de sensations, on ne peut s'en passer, c'est plus fort que soi. C'est-à-dire que c'est plus gratifiant que son ego ; mais ça brûle par les deux bouts (mémoire saturée, projets insensés). L'outrance. L'outrage. Face !
(" je veux dire … pouce ! Mais je n'y arrive pas" : manque de mémoire immédiate).

Nombrilisme garanti ; ça passe ou ça casse. La course aux datas. La fuite ? La croyance éperdue, supralogique l'aveuglement. Ment.

Tableau

 

 

 

l'Orgueil

 

 Fier, hier d'avoir brûlé les étapes, d'avoir contourné les deux écueils précédents, conscient de sa valeur absolue (plus qu'égocentrée : universelle) on laisse la victoire déborder. L'exponentiel caracole devant le différentiel de traîne. La fatuité guette. Un échec sans prétention, juste une panne d'âme.

Momentanée, sans doute (on "doute de rien"). On brille par son absence (de lucidité) ; pourvu que rien ne bouge …

Au casino : "Tu joues gros, tu commences à me faire peur" dit-il d'une voie monocorde.. Sorti du "Je", c'est la nuit, la marée montante …Heureusement pour le phare, perpétuellement sur la pointe des pieds : il reste des bateaux (mais pour combien de temps ? Les chalutiers sont rémunérés par Bruxelles-les-Bains, s'ils partent à la casse. L'orgueil est parfois bien placé ... A moins que ça ne soit l'honneur du marin.)

C'est donc qu'il reste des pêcheurs, quand même, qui travaillent encore de nuit. Sur le quai, le phare bipède a cligné de l'œil pour leur faire un signe … Un flash au laser, croyait-il, la paupière lourde, mais l’œil brillant d'autosuffisance. La vanité a un irrésistible goût sucré… Les larmes sont salées, cela reste à découvrir. Au crépuscule...

Finalement, en pareil cas, on croit infiniment en soi (mais avec une foi contrôlée dans le rétroviseur). Il paraît qu'on est. Unique. On en est la preuve aux yeux de tous.

Mais oui, on sait bien qu'on a besoin des autres pour exister. Et on en crèverait de l’avouer, que c'est sa seule raison de vivre ! (et puis que ce soit Dieu qui ait toujours le beau rôle, ça nous défrise…) Ys.

"Tout luit, tout brille, mais rien ne brûle" (Miossec) But "let the good times roll…" (Louis Jordan) All.

Tableau

 

Warning : Même si l’on pense éviter ces écueils en prenant sur soi, il reste que l’image de l’archétype correspondant à son identité, que l’on retrouve par le regard des autres, est parfois divergente (très). Il reste donc à ne plus être encore l’ignorant (vacant), le passionné (obtus), ou l’orgueilleux (de service) de l’autre…

Mais ce n’est pas un problème, parce que c’est amusant de se glisser dans la peau d’un personnage imaginé par quelqu’un d’autre (surtout s’il est supérieur à ce qu’on croit être, au bout du compte… Et ça peut arriver : à force de jardiner solitairement son espace intime, on finit toujours par dépasser ses capacités escomptées).

 

 

 

Pax

 

 

 

« Ego-killer, Ego-killer

Tu construis ton propre malheur

Ego-killer, Ego-killer

Tu joues gros, tu commences à m’ faire peur

Et si tu cherches une identité

Faudra qu’ tu viennes le jour des rois…

T’es pas tout seul dans la citée

Il y en aura toujours plus haut que toi »