... de sa plume
« la lettre tue et l'esprit vivifie »*

*{cf. "Archive des Anges" d'Alix de Saint-André à propos de St Augustin [Confessions/livre VI, ch. 4 ; citant St Ambroise, qui faisait référence à 2 Corinthiens III, 6] (!) }

"Littera occidit, spiritus vivificat !"

C. Vanel & Y. Montand dans le film de Clouzot



l'œuvre :

Désillusionné à la toile émeri (voire à l'acide sulfurique), il profite de sa lucidité protéiforme jusqu'à l'ivresse, et paye la tournée à qui veut bien l'entendre...
On lui prête des engagements partisans alors qu'il ne pratique que les rapports humains. Dans tous les milieux avec aisance, dans chaque bord en quête de sincérité, il apprécie et tranche dans le vif les pré-jugés et les approximations... S'il vous a à la bonne, il oublie les a-prioris.
Jamais les communistes ne lui firent prendre sa carte du parti, mais plus d'un s'est senti accompagné par le gaillard, au-delà du café du coin...
On ne saurait dire qu'il fut du côté des résistants, mais on aura difficilement pu ne pas savoir ce qu'il pensait du "Maréchal P..." en particulier (par sa pièce de théâtre).
Sans être caméléon, il n'est jamais rassasié de capter le vécu de ces particuliers qu'il rencontre (dut-il aller très loin pour s'en approcher).
Il sait magnifiquement, comme les bons joueurs de Blues, renvoyer la dimension universelle des qualités humaines (bonnes ou mauvaises), saisies dans leur quotidienneté ; loin des croyances, à l'écart des faux-semblants et des idéaux formatés, ou des utopies frelatées.
Son sacrifice personnel, dans l'action, lui assure une faculté d'empathie exceptionnelle, une force de persuasion redoutable.
Mais qu'on ne s'y trompe pas : il
œuvre, satisfaisant toujours sa faiblesse pour l'invention de coups tordus, au-dessus des rapports de proximité physique, ou de factualité éphémère. Les liens qu'ils nouent sont au-delà du temps et de l'espace, définitivement affranchis de la promiscuité.

 

« Tout le long de ces routes où cette femme me manque,
je lui raconte ce que je vois, ce qui se passe, comme si - drôle d'idée -,
comme si elle était assise tout ce temps-là à côté de moi, les yeux fermés. 
» (Voyage du mauvais larron. p71)

 

Sa vie est aussi un peu son œuvre. Et comment !? (Savant mélange de détermination et d'incohérence).

Il a bon dos.
Mais lui seul garde le cap, en connaissance de causes ... Même si les arcanes sont brouillés.

 

Son écriture, toujours très bien documentée, est pourtant prolixe ; même si tout n'aboutit pas. Mais cela fait partie de l'art de l'improvisation... Il faut bien commencer par un thème connu. Certains ouvrages seront réécrits plusieurs fois (peaufinage, ou refonte de romans à cause de la participation de rewriters imposés par certains éditeurs. Le Voyage du Mauvais Larron fut même l'objet de deux éditions différentes [en 1951 et 1987]. Arnaud préférera vite alors plutôt l'écriture à quatre mains, dans une collaboration ouverte). Il adaptera aussi son travail pour le cinéma ... (ou pas, malgré les avances en dollars répétées).

Même sans papier disponible (il déboule alors chez les voisins, qui deviendront d'ailleurs des amis), le besoin impérieux d'écrire ne le lâchera jamais, partout. (Ex: Ce qu'il ne racontera pas dans son roman cité plus haut, c'est que le passager clandestin, qu'il était, fut découvert sur le cargo ; et que le commandement comme l'équipage furent ensuite aux petits soins pour lui afin qu'il couche sur le papier ces formidables récits d'aventure qu'il évoquait devant eux. Ce furent probablement ses premiers lecteurs).

 


* Toutes ressemblances avec des délations, des manipulations, des persiflages ou des diffamations seraient purement volontaires... Cela va sans dire.


 - Georges Arnaud - 

- couvertures & affiches -

  Bibliographie

 

Georges Arnaud a aussi écrit de nombreux articles pour Arts, L'Aurore, Combart, L'Express, France-Soir, L'Humanité, Le Journal du Dimanche, Libération, Le Matin, Le Monde, El Moudjahid, Paris-Presse, Réalités... et surtout pour France-Dimanche, Les Lettres françaises, et Révolution africaine.

(Ex: "Je suis un dévoyé" document autobiographique à épisodes ; ou "La Sueur", 1955.)

°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

            Et aussi, à lire possiblement :

- Georges Arnaud : Vie d'un rebelle - La meilleure biographie connue à ce jour, celle de Roger Martin, objective.
(Calmann-Levy, 1993)
- La Serpe - Un "roman" de Philippe Jaenada, qui approndit méticuleusement (non sans humour) la vie de ce personnage trop peu connue, sur une période donnée (autour de son premier procès). D'où quelques révélations (avec des morceaux de vérité dedans, inédits)...
(Julliard, 2017)

Contextes (une zone toujours occupée, une crise qui n'en finit pas...)

 La naissance des "intellectuels" : adjectif redevenu substantif, sans que cela soit péjoratif, (car ça l'était initialement dans la rhétorique de Clemenceau, inspirée lors de l'affaire Dreyfus) - mais bien au contraire, revendicatif, sous la plume de Maspéro puis de Sartre notamment, pendant le procès politique de G. Arnaud qui fit grand bruit.

Et c'est à ce moment que s'est établie durablement une garantie professionnelle affirmant la protection du secret des sources usitées par les journalistes (et autres activistes... ?)

_____________________________________________________


 

{...}
" Il pourrait alors vivre paisiblement de sa plume, mais il n'a cesse de se battre, mettant son talent littéraire au service des causes les plus dangereuses: arracher à la mort Djamila Bouhired, soutenir le combat de l'Algérie indépendante - ce qui lui vaudra à nouveau de passer deux mois sous les verrous -, dénoncer les erreurs judiciaires... En 1962, il participe auprès de Ben Bella à la naissance de la République algérienne.
Il mourra d'une crise cardiaque à Barcelone en 1987.
Retracer l'existence de ce personnage picaresque, c'est faire revivre un passé proche, mais déjà flou dans les mémoires: celui de l'effervescence intellectuelle des années d'après-guerre, celui de la Guerre d'Algérie et de l'engagement des gens de lettres."

R. Martin
     
 
   
Filmographie